C’est une quête de mémoire, qui débute à la fin du XIXe dans la brousse et s’achève en 2013 à Nouméa avec la statue commémorant ces 6000 hommes et femmes venus développer l’île, les Viet-kieu.

L’ouvrage, partagé en quatre parties (introduction – Mauvaise fille – Le cuistot – Eastern queen) retrace l’arrivée des Indochinois en Nouvelle-Calédonie à la fin du XIXe siècle venus travailler dans les mines de nickel, minerai découvert en 1864.

Conçue comme un road-trip contemporain sur le « Caillou », le récit proposé suit chronologiquement, grâce à des flash-backs, l’intégration ponctuée de rejets, tel celui consécutif à la défaite française de Dien Bien Phu (1954), d’une communauté vietnamienne principalement composée de Tonkinois (nord du Vietnam).

De la mine à la supérette

Au fil du temps, le lecteur observe ces Viet-kieu (prononcer Viette Kiou), ou Vietnamiens de l’étranger, initialement mineurs assujettis à la violence de leurs employeurs, évoluer professionnellement pour devenir d’excellents commerçants de proximité, ou encore des artisans.

L’illustration et le récit sont signés Clément Baloup, qui livre ici la quatrième volume de sa série Mémoires de Viet-kieu constituée de Quitter Saïgon, Little Saïgon et Les mariées de Taïwan. L’auteur est donc devenu une référence de la question Viet-kieu. Les illustrations marient un dessin minimaliste à des aquarelles, tandis que le récit s’adosse à de nombreuses rencontres, à des témoignages et à des recherches archivistiques, comme l’atteste le document source mobilisé à chaque début de chapitre. Enfin, la postface de Tess Do, Maître de conférences en Etudes françaises à l’Université de Melbourne, consolide la dimension documentaire de cette bande dessinée.

Flux impériaux périphériques

Signalons enfin que cette BD s’insère dans une actualité historiographique riche quant à la question de l’engagisme dans l’empire colonial français. En effet, Le Travail forcé dans les colonies françaises, 1900-1946 de Peter Gaida, aux Indes sanvantes (2021), ainsi que Les migrations impériales au Vietnam  d’Eric Guerassimoff, Andrew Hardy, Nguyen Phuong Ngoc et Emmanuel Poisson (coord.) chez Maisonneuce te La rose (2020) soulignent l’extrême acuité de ces flux impériaux périphériques. 

La présentation de l’éditeur :

https://www.la-boite-a-bulles.com/book/632