Quand on parle d’affaire, le premier nom qui vient à l’esprit est celui de Dreyfus. Céka au scénario, Chandre au dessin et Emmanuel Bonnet aux couleurs empoignent donc ce sujet connu. Cet ouvrage, conseillé à partir de dix ans, peut évidemment être lu par tout le monde. Il retrace, en une cinquantaine de pages, ce moment d’histoire qui déchira la France à la fin du XIXème siècle. Il est composé d’une bande dessinée et d’un dossier pédagogique illustré. 

Les racines de l’Affaire

Le récit commence en 1895 par l’épisode de la dégradation d’Alfred Dreyfus dans la cour de l’Ecole militaire à Paris. C’est l’occasion d’entendre les paroles devenues célèbres du capitaine qui clame son innocence ainsi que de voir l’image du sabre brisé. Le récit revient alors quelques mois en arrière pour expliquer comment a commencé ce qui allait devenir l’Affaire Dreyfus.

Le parcours d’Alfred Dreyfus

Les auteurs font le choix de retracer rapidement le parcours d’Alfred Dreyfus. Il entre à Polytechnique en 1878 puis à l’Ecole de guerre en 1890. Ensuite, on découvre Estherazy qui, ayant besoin d’argent, intrigue en fournissant des renseignements ultra-sensibles à l’Allemagne sur le canon de 75. La bande dessinée explique la mécanique diabolique qui conduit Alfred Dreyfus à être accusé de passer des secrets à l’ennemi. Arrêté, mis au secret, il est interrogé plusieurs jours de suite au mépris de toutes les règles. Au passage, on voit le rôle de Bertillon et de sa fumeuse théorie de l’autoforgerie qui permettait d’expliquer que Dreyfus aurait transformé son écriture pour ne pas être confondu.

1895-1898 : le temps de l’oubli

Après un simulacre de procès, Alfred Dreyfus est donc condamné et déporté au bagne de l’Ile du Diable. Il y reste quatre ans, perpétuellement surveillé, humilié et sans aucune nouvelle de ce qui se passait alors à Paris. Pendant ce temps, le colonel Picquart découvre qu’Estherazy est le vrai coupable. Il s’aperçoit que le dossier secret est en réalité d’un vide abyssal. Comme chef du renseignement, il veut réouvrir l’instruction mais, lâché par sa hiérarchie, il est ensuite muté en Tunisie pour essayer d’éteindre le feu.

Zola entre en scène

Alerté sur ce dossier, Emile Zola s’en empare. Son célèbre « J’accuse » se vendit à 300 000 exemplaires là où, habituellement, le journal « l’Aurore » tirait à 30 000 exemplaires. Emile Zola est malgré tout condamné lors d’un procès, mais il a atteint son but : faire sortir l’affaire de la confidentialité. 

Vers la réhabilitation

La bande dessiné évoque ensuite plusieurs autres rebondissements comme lorsque le général Cavaignac s’aperçoit que le dossier secret est totalement vide, alors qu’il s’est engagé peu avant à en révéler le contenu. Henry, qui avait fabriqué un faux, est arrêté et on le retrouve mort le lendemain dans sa cellule. Il faudra attendre 1906 pour qu’Alfred Dreyfus soit réhabilité. 

Le dossier pédagogique

L’ouvrage se termine par une dizaine de pages qui évoquent, notamment, le contexte de l’époque, la montée de l’antisémitisme ou encore la France fracturée en deux entre Dreyfusards et antidreyfusards. Une chronologie simple, mais suffisante, permet de se repérer. 

Cet ouvrage permet donc dans un format assez rapide d’expliquer ce que fut cette Affaire qui déchira le pays. Le récit est clairement mené et la mise en perspective proposée par le dossier complète utilement l’ensemble. 

Jean-Pierre Costille