L’ouvrage de Frédéric Keck, anthropologue et philosophe au CNRS et au Collège de France, s’intéresse aux rapports entre humains et animaux sous l’angle des privations de liberté étant apparues lors de la pandémie de Covid-19.

Il interroge la conception de la place que nous pouvons avoir dans la chaine du vivant et ce, dans le cadre de nos sociétés occidentales qui ont l’habitude de séparer l’homme et l’animal. La citation du bactériologiste René Dubos est éclairante : « la nature contre-attaque, il faut courir pour rester à la même place ».

Diverses idées très intéressantes sont évoquées : la nécessité d’avoir des « chasseurs de virus » qui étudient sur le terrain des mutations de virus alors que ceux-ci sont stables en laboratoire, la possibilité de synchroniser les mutations en laboratoire pour anticiper l’infection dans la nature.

Le livre contient également des développements sur la chaîne du froid avec une « troisième hypothèse » (outre l’accident de laboratoire à Wuhan ou la contamination sur le marché) qui serait celle de l’importation en Chine de produits congelés venus d’Occident et qui se seraient retrouvés exposés sur des étals chinois. Les Chinois ont une préférence pour l’animal vivant qui sera tué in situ en raison de la méfiance envers la chaîne du froid venue de l’étranger.

Cela inspire aussi un éventuel projet « d’arche congelée » où, comme pour les semences, on imaginerait préserver des espèces animales en cas d’extinction massive mais se posent des questions éthiques de dédoublement d’espèces qui existeraient en « réel » et en « virtuel ».

Un autre axe sur la responsabilité collective est évoqué à l’appui de l’exemple du réchauffement climatique : le COVID-19 a affecté les pays du Nord alors que le réchauffement climatique touche plutôt ceux du Sud. Et les pays du Nord ont pris des mesures contraignantes anti-COVID qu’ils n’auraient jamais été prêts à prendre au sujet du réchauffement climatique

C’est sur ces passages relativement factuels que j’ai bien réussi à saisir le propos du livre n’étant que très peu familier avec les concepts abordés (biopolitique, pensée sauvage…) et les référents théoriques (Lévi Strauss, Foucault…). Cette limite personnelle assumée, l’opus apporte sa contribution au débat sur l’intégration des « questions animales » dans un contexte où la « question sociale » a toujours dominé.