Tel est le constat de départ effectué par Yannick Brun-Picard, docteur en géographie, spécialiste de didactique et de sciences humaines et sociales et auteur de plusieurs ouvrages dont on retrouve un nombre important de titres dans la conséquente bibliographie présente à la fin de cet ouvrage (presque 2 pages sur les 18 proposées !).
L’auteur annonce rapidement la problématique qui sous-tendra son livre et qui devrait, selon lui, permettre de raviver cette flamme, cette soif de savoirs et de connaissances chez les apprenant·e·s de tous âges : « pour endiguer ce fléau éducatif, il est impératif de repositionner la didactique au service de la pédagogie afin de faire vivre, de dynamiser et d’inciter les élèves à acquérir, à assimiler et à projeter les savoirs présentés. » (p. 9). Partant du principe que les recherches actuelles tendraient vers une séparation nette de ces deux branches que sont la didactique et la pédagogie occultant ainsi tout ou partie des « réalités éducatives », Yannick Brun-Picard refuse tout procès mais explore les limites du « tout » (« tout didactique » et « tout pédagogique ») les « errances » (p. 11) et les réalités des pratiques, préférant articuler et agréger les deux domaines pour les inclure et les lire à travers les pratiques éducatives et d’enseignement.
L’ouvrage se veut pédagogique avec de multiples références et renvois, des définitions (par exemple : « territoire référentiel d’échange », p. 20 ; « praxéologie », p.23 ; « violence ». p. 31 ; « zone proximale relationnelle », p. 34 ; « théorie de la ‘’géographicité’’ », p. 169 ; « territoires de mémoires », p. 171 etc.) qui font écho à d’autres ouvrages de l’auteur (voir pour aller plus loin, l’un des comptes rendus à propos de son livre sur la « géographicité » disponible sur le site) mais également 112 figures ou « carrés sémiotiques » (p. 15) pour selon l’auteur « représenter les articulations internes des constructions cognitives [qu’il veut] rendre accessibles et explicites au plus grand nombre de destinataires » (p. 15).
Pour autant, sa lecture est ardue (notamment pour les néophytes) et l’on peut déplorer son aspect très théorique et conceptuel. L’imbrication et les interdépendances entre didactique et pédagogie sont rappelées à de multiples reprises, conceptualisés et questionnés (« La didactique est indissociable de l’action pédagogique. Elle façonne le savoir à diffuser pour que les destinataires puissent saisir ce qui leur est proposé. », p. 163 ; « Les imbrications de la didactique et de la pédagogie sont présentes à chaque étape où ces deux domaines se trouvent en relation, en tension, voire en opposition. », p. 176) afin de montrer que le but de tout[·e·] « pédagogue didacticien[·ne] p. 182 (l’auteur choisit le masculin, expliquant le faire par soucis de simplification et laissant le débat sur l’ordre des mots, qu’il juge « secondaire », p. 182) se doit de mettre en œuvre toutes les stratégies pour susciter l’intérêt et la curiosité des élèves. On peut constater que les allusions aux « réalité[s] éducative[s] » p. 185 sont relativement éparses et l’ensemble de l’ouvrage manque d’exemples concrets, de cas de « terrain » voire des propositions de mise en œuvre « pratiques » à destination des enseignants des plus jeunes aux plus « aguerris », soucieux et conscients de la nécessité de faire évoluer leurs pratiques et d’intéresser leurs élèves.
Cependant, Yannick Brun-Picard, qui aime « secouer les neurones » (à en croire sa page Facebook), a le mérite de vouloir faire entrer ses lecteurs et lectrices dans une : « nouvelle dimension des pratiques éducatives et d’enseignement » p. 219. Avec humilité, l’auteur admet « avoir commis des digressions » (p. 189) mais, assurément, la lecture de ce livre stimule et questionne nos pratiques éducatives et le système de l’enseignement aujourd’hui. Il livre des pistes conceptuelles et théoriques à une interrogation que se pose certainement beaucoup d’entre nous, celle de favoriser au mieux la motivation et la réussite de nos élèves !
Rémi BURLOT © Les Clionautes