Revue interuniversitaire, internationale et quadrimestrielle, Pallas publie en français mais aussi en anglais, en espagnol, italien et allemand, des articles d’enseignants, jeunes chercheurs et doctorants. Les sujets abordés, réunis dans des dossiers thématiques traitent des sciences de l’Antiquité au sens large et intéressent tous les domaines des civilisations grecque et romaine : littérature, linguistique, métrique, histoire, archéologie, iconographie. Tous les deux ans, Pallas accueille le numéro thématique consacré à la nouvelle question d’histoire ancienne aux concours de l’enseignement du CAPES et de l’Agrégation.

Ce numéro 111 réunit les actes du colloque de la SoPHAU, qui a eu lieu à Bordeaux, du 13 au 15 juin 2019. Le thème est « Religion et pouvoir dans le monde romain de 218 avant notre ère à 235 de notre ère », sujet présent au concours de l’agrégation d’histoire session 2020-2021.

Déjà, en 1975, « Après quinze années, la religion romaine vient de reparaître au programme de l’Agregation d’Histoire. On doit s’en féliciter, car l’histoire des religions païennes de l’Antiquité constitue un domaine avec lequel nos jeunes historiens ont trop peu de contacts » se félicitait Joël le Gall.

 En douze articles très riches, la place, la pratique et la diffusion de la religion au sein de toutes les strates de la société romaine, dans tout l’Empire, est analysée.

Dans un premier article, Nicole Belayche rappelle de quels outils dispose l’historien en général et celui des religions de l’Antiquité en particulier et explique comment les perspectives furent modifiées pour ces chercheurs. Ne prétendant pas faire une revue complète en un article, elle a privilégié « quatre aspects qui concentrent tout spécialement les renouvellements de paradigmes dans les études des faits religieux romains, et qui continuent d’alimenter le débat scientifique : le ritualisme et l’accent mis sur la spatialité, qui invitent à clarifier la notion de croyance, et à évoquer le débat actuellement pendant entre religion civique et individu ».

A travers différentes sources et différents thèmes, ce colloque a abordé la légitimation religieuse du pouvoir dans le monde romain à travers le monnayage. L’exceptionnelle diversité des types monétaires compose une riche source historique, exploitée dans cet article, où la communication politique à Rome passe par la monnaie. La période étudiée dans cet article couvre le 1er siècle AV.J.C. Jusqu’à l’époque des Sévères (193 à 236 ap JC). Cette diffusion de la monnaie frappée à l’effigie des divinités a contribué au développement de nouveaux cultes.

Dans les colonies romaines, quel était le statut des religions autochtones ? Comment le droit romain s’imposait tout en tolérant la pratique des religions locales ? Pour cela, Audrey Bertrand s’appuie sur la Lex Vresonsis « seule charte de fondation coloniale dont nous disposions » pour montrer que la religion dans l’Empire romain est un puzzle constitué de pratiques différentes.

Pour se recentrer sur Rome, Alberto Dalla Rosa étudie les aspects religieux du pouvoir impérial, qui est confirmé par les Dieux. Il clot le débat sur la soumission de toutes les armées aux auspices du prince en démontrant que ce processus était lié à l’extension progressive de son imperium et pas à une réforme religieuse. Donc, le pouvoir politique se sert bien de la religion pour s’étendre et se faire accepter.

Christophe Schmidt Heidenreich montre que le culte rendu au prince par l’armée occupe une place centrale dans la vie religieuse de l’armée, entre le Ier et le IIIe siècle, et décrit comment cela a évolué sous la République.

Les provinciaux ont intégré le culte impérial à leur pratique et dans leurs structures religieuses locales, sans que cela ne remette en cause ni l’identité religieuse ni l’autonomie des cités. Gabrielle Frija propose une réflexion sur les modalités de diffusion de ces rites dans tout l’Empire romain.

Sylvia Estienne analyse les aspects religieux et politiques de la célébration des jeux à Rome depuis la création des Ludi Apollinares à la célébration sévérienne des Ludi saculares. Elle étudie spécialement le ritualisme afin de comprendre comment les jeux étaient des objets historiques, en analysant les interactions entre les structures du pouvoir et l’organisation religieuse des rituels.

Dans la continuité du sujet précédent, Yann Berthelet explique comment la cohésion civique est maintenue par les pratiques religieuses, dont la divination publique, pendant laquelle les dieux sont associés aux prises de décisions de la cité.

Dans son article, Françoise Van Haeperen explique le lien entre les pratiques de la religion et le droit, imbriqués dans la vie politique.

Après avoir mis en lumière les pratiques publiques, impériales, militaires, parfois indépendamment parfois liées entre elles, Marie-Odile Charles-Laforge ici étudie les « cultes privés chez les Romains (IIIe siècle AV J.C. – IIIe siècle après J.C. ) et elle redéfinit la notion de culte privé en lui préférant culte domestique, duquel elle retrace la sociabilité induite par cette pratique. La fin de la période étudiée montre qu’il y a un élargissement « du panthéon familial à de nouvelles divinités et l’introduction du culte impérial au niveau de la domus et du compitum ».

La pratique du culte, son organisation, sa place dans la cité et dans la vie des citoyens seraient incomplets sans l’analyse de la place des images dans le monde romain. Valérie Huet retrace l’historiographie relative à la question « images, rituel sacrificiel et pouvoir dans le monde romain ».

Enfin, Daniele Miano analyse en trois parties « divinités conceptuelles et pouvoir dans le polythéisme romain ».