tirailleurs-sénégalais – Le sujet est toujours sensible comme en témoignent ces compléments que nous associons à cette présentation de l’ouvrage et de son auteur.
L’auteur, Julien Fargettas, est docteur en histoire contemporaine ; ancien militaire il est directeur du service départemental de l’ONACVG1 de la Loire.
Sa thèse (IEP d’Aix / Université de Provence) est consacrée aux Tirailleurs sénégalais de la Seconde Guerre Mondiale et a été publiée aux éditions Tallandier en 2012 sous le titre : Les tirailleurs sénégalais – les soldats noirs entre légendes et réalités 1939-1945. Il a aussi publié en 2019 La fin de la « Force Noire » – Les soldats africains et la décolonisation française , Les Indes Savantes.
Dans ce nouvel ouvrage il retrace les événements de juin 1940 et le sort des troupes coloniales dans les combats qui eurent lieu au nord de Lyon.
Un film de Eveline Berruezo et Patrice Robin
Premier document scientifique français à parler du Tata et de Thiaroye
En juin 1940 des tirailleurs sénégalais résistent à l’ennemi nazi
En juin 1940, des tirailleurs sénégalais occupent une position stratégique pour résister à l’ennemi nazi. L’affrontement dure deux jours. La réaction des Allemands, vainqueurs, est terrible de fureur et de sauvagerie.
Un cimetière africain, un Tata, érigé en pleine campagne française, témoigne de cette bataille.
Le premier document scientifique sur le Tata
Ce documentaire est avant tout un film historique. Les auteurs adoptent l’attitude du chercheur s’interrogeant sur un lieu (un cimetière militaire à Chasselay), sur les faits qui en ont déterminé l’existence, sur la recherche des sources et des témoins.
Il soulève un grand nombre d’interrogations qui sont le point de départ d’une information et d’un questionnement sur la colonisation, sur la France, sur l’Allemagne et sur l’Afrique.
C’est le premier document scientifique sur le Tata. Le témoignage, un propos brut sans censure, est privilégié pour relater un événement tragique, le massacre de tirailleurs sénégalais.
Prendre le temps d’explorer un sujet tabou, de retrouver un soldat survivant, d’écouter des témoins, sans effets, sans reconstitution historique, avec des silences qui persistent, des blessures non guéries, c’est un choix d’exigence qui nous invite à la réflexion et à l’analyse. Cette œuvre suscite la compréhension et l’empathie sans prendre le spectateur en « otage compassionnel », en cela c’est aussi un film éthique .
Ce documentaire est intemporel et contemporain. Il résonne étonnamment au sein de notre société car il nous engage et nous responsabilise, nous spectateurs de ce fait d’histoire.
Dédié aussi à Jean Moulin, ce film est un appel à la résistance pour les valeurs de la démocratie et de l’humanisme.
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Le temps des combats
L’auteur fait un récit détaillé des événements qui préparent le massacre de Chasselay, une histoire événementielle très précise des combats des 19 et 20 juin 1940. Il propose un bilan matériel et humain très complet.
Mal renseignés dans les sources, sans beaucoup de témoins, les massacres débutent dès les premiers engagements violents entre les défenseurs de la ligne de défense établie au nord de Lyon et les divisions allemandes qui foncent sur la ville. L’auteur montre la séparation d’avec leurs officiers français et les premières exécutions sommaires de soldats africains et le caractère racial de l’attitude des troupes allemandes. On retient le soin apporté à restituer à ces soldats qui se sont battus avec courage, leur identité2 et par là leur dignité. L’auteur montre l’enchaînement qui conduit au massacre volontaire, haineux des prisonniers de guerre notamment celui de Chasselay, le 20 juin.
http://tirailleurs-senegalais.fr/
Le temps des massacres
Dans un encart d’une vingtaine de page, Baptiste Garin3 fait une analyse très précise de huit clichés photographiques extraits de l’album privé d’un soldat allemand. Contrairement aux images officielles des Prapagandakompanie, ces photos montrent, ici, un crime de guerre que la propagande souhaitait occulter et permettent d’identifier les soldats du 8e régiment de la 10e Panzerdivision comme les auteurs du massacre et non ceux de la division SS « Totenkopf » à qui il est souvent attribué. Les photos confirme le rapport de l’adjudant Regnier, témoin oculaire des faits.
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Outre le massacre de Chasselay, Julien Fagettas décrit les exactions en divers lieux mais aussi, brièvement, les actes de solidarités des civils pour venir en aide aux soldats blessés, égarés. Il évoque le sort des prisonniers regroupés à Lyon puis conduits vers Dijon avant les Frontstalag4.
Le temps des hommages
Cette dernière partie s’ouvre sur le Tata de Chasselay inauguré en pleine guerre. Dès la fin des combats s’est posé la question des dépouilles, réglée d’abord localement à l’initiative des maires et des habitants dans un flou administratif réel.
L’auteur retrace les efforts de Jean-Baptiste Marchiani5, chargé par le préfet de Lyon « d’assurer aux dépouilles mortelles de ces héros une décente sépulture. »6. Sa mission est décrite en détail jusqu’à la réalisation d’une nécropole, le Tata inauguré le 8 novembre 1942 non sans polémiques, elles aussi présentée minutieusement.
Un long paragraphe est consacré à l’information tardive des familles africaines, les titres de veuve, d’orphelin de guerre souvent difficile à obtenir comme les démontrent les exemples choisis. « Le Tata » fait l’objet de rendez-vous pour les scolaires et l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre œuvre ici à la politique mémorielle et éducative.
Cet ouvrage est un hommage aux tirailleurs et un travail très minutieux. Dommage que l’auteur n’ai pas entrepris l’étude des archives de la commune de Chasselay dont il est question : « en corpus impressionnant et unique en France »7, une source pour un/e jeune étudiant/e d’histoire.
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1Office national des anciens combattants et victimes de guerre
2Les noms de chaque tirailleur et leur origine sont présentés dans des encarts (pp. 79, 80, 113 à 116) d’après les documents militaires, la transcription atteste du peu de considération, de l’incompétence, de la précipitation au moment de leur enregistrement : nom, prénom tantôt dans cet ordre tantôt nom, prénom ; par ex : Seyni Fall (p. 79) mais Fall Mamadou (p. 114). Mais vu le travail d’enquête très minutieux de l’auteur je m’étonne qu’il n’ait pas dans le texte restitué, dans la mesure du possible, leur identité réelle ce qui aurait pu être fait en collaboration avec l’Office National des Anciens Combattants de Dakar.
3Jeune collectionneur privé
4Sur ce thème on peut lire : François Campa, Les prisonniers de guerre coloniaux dans les Frontstalags landais et leurs Kommandos 1940-1944, les Dossiers d’Aquitaine septembre 2013 et Armelle Mabon, Prisonniers de guerre “indigènes”, visages oubliés de la France occupée, Paris, Editions La Découverte, 2010
5 Secrétaire général de l’Office départemental des mutilés, combattants, victimes de la guerre et pupilles de la nation
6 Cité p. 141
J’ai beaucoup de considération pour votre recherche sur les massacres de Lyon, on aimerai que la lumière soit faite sur le naufrage des anciens combattants au Sénégal dans les commémorations on est souvent oublié du coté français comme du cote américain nous avons payé beaucoup de tribut.