Voici donc entre mes mains le troisième opus de la série « Visages – Ceux que nous sommes ». Ce dernier, intitulé « 3. Vers la fontaine ardente » reste le fruit de la collaboration entre deux scénaristes talentueux (Nathalie Ponsard-Gutknecht et Miceal Beausang-o’Griafa) et d’Aurélien Morinière au dessin.
Avant de lire les lignes qui vont suivre, je vous invite à lire les CR des deux tomes précédents, que vous trouverez ici et ici.
Comme pour les deux premiers tomes, le tome 3 nous invite à suivre la vie des différents personnages entre 1940 et 1943 (en faisant des sauts temporels). Il semble donc plus pertinent de faire un bref résumé protagonistes par protagonistes.
Louis KERBRAZ
Juin 1940 dans une petite bourgade française, Louis Kerbraz rencontre de manière fortuite Sheila et son fils Georg, deux snipers allemands ayant décimé son régiment. S’ensuit alors leur réconciliation permettant à Georg d’en apprendre un peu plus sur sa mère et lui donner espoir de la retrouver en Allemagne.
(Avis personnel : cette entrée en matière m’a laissé un peu perplexe. Alors que l’on quitte Georg emplit de colère contre son père et loin du front français, voilà qu’en l’espace de 9 pages, les retrouvailles sont faites et Georg découvre des informations sur sa mère comme si de rien n’était).
Nous retrouvons ensuite Louis en 1941 dans un Paris occupé. Gérant d’un cabaret il apparaît aussi comme résistant. En lien avec les officiers français, Louis les renseigne et participe ainsi à l’assassinat d’officiers allemands. Il interviendra toutefois pour en sauver un (l’Oberstleutnant Von Linden), après l’avoir vu sauver un enfant juif le matin même lors d’une descente des gendarmes français répondant aux ordres du commissariat général aux questions juives. De cet épisode semble naître une amitié entre les deux personnages.
Georg (et Sheila)
Après avoir rencontré son père, Georg poursuit ses recherches pour retrouver sa mère. En Avril 1942, il se rend au camp de Buchenwald où travaille le Dr Mühle (cf tome 1). Il apprend ainsi que sa mère travaillait au Stuttgarter Zeitung. Georg finit par se rendre à Berlin où il rencontre Wolfgang (le mari de Lieselotte et rédacteur en chef du journal). Malheureusement, Lieselotte est en reportage à Munich et n’a pas donné de nouvelles depuis plusieurs semaines…
Fin novembre 1942, Georg et Sheila sont envoyés à Stalingrad pour contrer les snipers russes. La situation est critique et nos deux snipers doivent s’extraire de la ville pour organiser le ravitaillement. Georg va alors rencontrer Peter Bailly (le cousin de Lieselotte, arrêté à la fin du tome 2 et envoyé au front). Tout comme sa cousine, Peter pensait que Georg était mort-né.
Lieselotte
En 1941 Lieselotte est toujours journaliste et enquête sur les camps de concentration. Elle se prépare à partir en Pologne afin de poursuivre son enquête sur les camps. Arrivée Todz, son informateur lui montre le ghetto des juifs. Puis ils se rendent à Chetmno où se trouvent le « château de l’horreur » où les déportés sont triés, déshabillés avant d’emprunter un couloir les menant à des camions dans lesquels ils sont gazés. Lieselotte peut ensuite photographier les fosses communes dans lesquelles les corps sont entassés puis enterrés. Ainsi pour Lieselotte « personne ne pourra jamais dire que ça ne s’est pas passé ».
Un an plus tard, Lieselotte est à Munich et soutient des groupes de résistants allemands (Die weisse Rose) qui dénoncent les crimes du régime Hitlérien. En rédigeant des tracts et en les déposant discrètement en ville, ils espèrent toucher l’opinion. Le groupe va toutefois être arrêté et Lieselotte sera inculpée pour complot contre le Reich avant d’être envoyée à Dachau en mai 1943. Y sont ensuite décrit les conditions de vie des occupants.
Quand les histoires se rejoignent…
En combinant les histoires de chacun et chacune, les connexions se font progressivement.
Lors d’une rencontre entre Georg, Sheila, Louis et l’Oberstleutnant Von Linden à Paris, ce dernier décide d’aider Georg à retrouver sa mère. Il finira par apprendre qu’elle est à Dachau et fera le nécessaire pour la placer à une tâche moins fatigante/dangereuse. Par une lettre reçue au camp, elle apprend que son fils mort-né ne l’est pas et qu’il la cherche.
Conclusion :
Ce tome 3 est – selon moi – le plus abouti. Si on omet la « brutalité » de la rencontre entre le père et le fils (ainsi que leur réconciliation éclair), le scénario se tient et on prend plaisir à voir la vie des personnages prendre forme et se rapprocher mutuellement. Nous avons entre les mains une bande dessinée qui s’appuie sans aucun doute sur de solides bases historiques pour construire l’intrigue.
Sans s’être plongé dans les 6 dernières pages (qui, comme dans les tomes précédents, sont là pour aller plus loin dans le contexte historique) on devine facilement les thèmes abordés ; et c’est ce que j’apprécie. Certaines planches pourraient donc être utilisées avec des élèves pour évoquer un ou plusieurs aspects de la WWII.
Le lecteur pourra ainsi s’informer davantage sur : « quand alsaciens et mosellans changeaient de nationalité » ; « L’exode, le visage de la défaite » ; « Irlande 1941, le Belfast Blitz » (évoqué assez brillamment dans la BD en deux pages) ; « Vichy » et « Répression nazie et camps » (relu par Tal Bruttman) ; jeunesse et résistance française » ; « résistance allemande » ; « Die Weisse Rose ».