Un atlas indispensable pour renouveler la géographie du tourisme et des loisirs
Enseignants-chercheurs à Paris 1, Maria Gravari-Barbas est professeur de géographie et Sébastien Jacquot est maître de conférences. Les cartes sont réalisées par la cartographe Claire Levasseur. Elle a participé à la réalisation de l’Atlas du Moyen-Orient (de Pierre Blanc et Jean-Paul Chagnollaud en 2016) et de l’Atlas de l’Empire romain (de Christophe Badel dont la dernière édition date de 2017).
L’atlas s’organise de façon claire autour de 5 axes : l’histoire, la mondialisation, les lieux, les enjeux et se termine par une typologie régionale. La France a accueilli 82,6 millions de touristes en 2016. Le recul critique sur cette donnée statistique est nécessaire : les États-Unis sont devant en valeur et la Chine serait la première destination mondiale en nombre d’individus en incorporant Hong Kong et Macao. Avec 1,2 milliards de personnes et représentant 10% du PIB mondial, le tourisme est à distinguer des loisirs. Les deux ont des infrastructures communes (musée, parc) mais le tourisme implique un déplacement temporaire par rapport à son domicile. Il apparaît au XVIIIème siècle avec le Grand Tour (d’où le mot « touriste » signifiant faire un tour) des jeunes aristocrates anglais. L’objectif était de visiter les lieux de l’Antiquité : Rome, Nîmes, Naples. Les préoccupations sont donc éducatives à l’origine. Des exemples de voyages réalisés par des hommes et des femmes (comme Mary Shelley) sont cartographiés : du Sud-Est de l’Angleterre à la pointe sud de l’Italie et de Nantes à Prague. Ces voyageurs anglais vont également être à l’origine de mutations urbaines dans leur patrie : l’exemple de l’étalement urbain de Brighton est caractéristique de ces aménagements littoraux pour accueillir, protéger et divertir les premiers touristes (digues, hôtels, Aquarium). Outre les littoraux britanniques, les espaces montagneux (Alpes françaises, italiennes et suisses) sont parcourus par des touristes d’Outre-Manche. En 1741, deux voyageurs, W. Windham & R. Pococke gravissent le Mont Maudit (que l’on appelle désormais le Mont-Blanc, signe d’un changement de perception d’une montagne-prédatrice à une montagne-terrain de jeu). Aux Etats-Unis, les touristes se plaignent déjà de l’agressivité des vendeux de souvenirs au chute du Niagara (entre 1860 et 1870).
Le tourisme est mis en scène lors des expositions universelles (à Paris, à Londres) en accentuant sur l’exotisme des lieux visités. Les empires coloniaux ne sont pas en reste : ainsi apparaissent des stations fondées par des colons, principalement en Asie. Gulmark en Inde, Penang Hill en Malaisie ou Baguio aux Philippines sont construites par les Britanniques et les Etats-Unis. Les Français vont à Dalat (Indochine). L’action des administrateurs coloniaux n’est pas oubliée. Dans ses mémoires, le géographe Yves Lacoste racontait la façon dont Lyautey prenait soin du petit patrimoine marocain à Fès. Une carte de l’atlas représente ce phénomène évoqué à l’échelle locale.
Quelques corrections seront nécessaires pour la seconde édition. Le Mali est confondu avec la Mauritanie à la page 81. Plusieurs coquilles subsistent dans les textes. La carte de la page 50 sur la fréquentation des musées est très difficilement lisible (pas d’unité, des localisations approximatives) et légèrement rognée sur la partie gauche. Celle de la page 52 sur les principaux parcs de loisirs est assez étonnante : les flèches partent dans de nombreuses directions ce qui complique la lecture. En témoigne également la place accordée à la légende (à moitié sur l’Afrique du Sud alors que l’Océan indien est vide). Dommage !
Un atlas indispensable pour la préparation des concours (Capes, Agrégation sur le tourisme et les loisirs + les littoraux pour l’ENS). Il permet une première approche avec le numéro de la Documentation Photographique. Nicolas Prévost propose des pistes pour aller plus loin dans son compte-rendu de deux ouvrages récents. Enfin, l’essai de Thomas Daum et d’Eudes Girard sur les voyages permet de disposer de riches exemples, notamment français.
Pour aller plus loin :
- Présentation de l’éditeur -> Lien
Antoine BARONNET @ Clionautes