Une réédition utile

Les textes rassemblés dans cet ouvrage sont issus d’un colloque organisé en 2008 par l’Institut national de recherches archéologiques préventives et la Cité des sciences et de l’industrie. Les actes avaient été publiés en 2009, le présent livre en est une réédition facilement accessible et à petit prix. Archéologue, professeur de protohistoire européenne à l’université Panthéon-Sorbonne et auteur de nombreux ouvrages, parmi lesquels une Documentation photographiqueLe Néolithique. À l’origine du monde contemporain , fort utile aux enseignants, Jean-Pierre DemouleAux origines, l’archéologie, Jean-Paul Demoule, La Découverte, 2020 assure la direction de ce recueil d’articles et en a rédigé l’introduction ainsi qu’une contribution (« Naissance des inégalités et prémisses de l’État »). Malgré la brièveté des contributions et leur caractère éclaté, ce travail possède de solides atouts qui intéresseront autant l’amateur éclairé (ou très peu éclairé comme l’auteur de cette note) que celui qui a déjà travaillé sur le néolithique et est au fait du renouvellement récent de la recherche sur cette période.

Un ouvrage aux solides atouts

               Tout d’abord, le regard y est résolument international. Le lecteur suivra les voies de l’émergence du néolithique (première partie) au Proche-Orient, en Afrique, en Amérique, en Chine, en France mais aussi au Japon. Le Bassin méditerranéen et l’Europe occidentale ne sont pas oubliées et sont présents dans les autres parties dans lesquelles des contributions embrassent un espace encore plus large. Par ailleurs, les contributeurs appartiennent à des aires culturelles et des institutions scientifiques diverses (INRAP, bien sûr, CNRS, Sorbonne… mais aussi : Université de Melbourne, de Canberra, de Genève… Centre de recherches archéologiques du Texas…).

 La démarche pluridisciplinaire est un autre atout.  Si les archéologies se taillent la part du lion, d’autres scientifiques : anthropologue, spécialiste de linguistique, ingénieur agronome ont été invités et apportent leurs contributions aux débats en cours.

               En effet, et c’est un des axes enrichissants pour le néophyte, les discussions entre les spécialistes du Néolithique ainsi que le renouvellement des connaissances sont présentées (de manière un peu succincte pour le non spécialiste parfois cependant). Peut-on vraiment parler de révolution néolithique ? L’expression de « néolithisation » ne conviendrait-elle pas mieux ? En effet, nombre d’articles insistent sur le fait qu’il s’agit d’un processus avec parfois des reculs, des essais qui ne fonctionnent pas et que le « contre-exemple Jômon au Japon » est présenté dès les premières pages de l’ouvrage. Pour nombre d’auteurs le néolithique n’était pas une fatalité.

Le Néolithique en cinq temps

L’ouvrage est composé de cinq parties. Dans un premier temps, six contributions reviennent sur l’émergence (ou non) du Néolithique dans diverses parties de la planète. La deuxième partie « Technique et environnement » questionne les facteurs qui ont favorisé la naissance et le développement de l’agriculture, de l’élevage et la sédentarisation dans différentes aires géographiques. Dans un troisième temps « Démographie, migrations, langues », sont plus particulièrement étudiés la diffusion des agriculteurs dans le monde, les échanges entre chasseurs-cueilleurs et agriculteurs en Europe occidentale et la « transition démographique agricole au Néolithique ». Deux contributions de la quatrième partie (« Idéologies et pouvoir ») ont largement retenu notre attention : celle de Marcel Mazoyer (agronome) sur les différentes agricultures néolithiques et celle de Jean-Pierre Demoule (« Naissance des inégalités et prémisses de l’État »). Cette dernière, stimulante, parfois provocante[1]  mérite, à notre avis, une lecture attentive et enrichira la réflexion des enseignants. Enfin la cinquième partie est centrée sur les héritages du Néolithique.

               Un ouvrage solide, à recommander aux professeurs qui voudraient parfaire et actualiser leurs connaissances sur ce moment capital de l’histoire des hommes et des femmes dans le monde. Seul regret, une solide partie sur la place des femmes dans la « néothilisation » aurait été utile.

[1] Au bon sens du terme

Jean-Paul Demoule est venu aux rendez-vous de l’Histoire de Blois 2017 apporter son éclairage sur la réflexion du néolithique : invention de l’agriculture, invention du pouvoir, à l’occasion de la sortie de son dernier livre : « Les dix millénaires oubliés qui ont fait l’Histoire« .