Quand les géographes « font leur cinéma », voilà ce que cela donne !
Jacques Lévy, professeur de géographie à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, membre du laboratoire Choros, a conçu et réalisé ce film de géographie, premier du genre. Ni documentaire, ni fiction, cette œuvre cinématographique demeure un travail universitaire d’un chercheur et lui permet de mettre en image et en son les enseignements des multiples recherches qu’il a menées depuis plusieurs années sur l’Urbain. La voix off alterne avec des lectures de l’ouvrage d’Italo Calvino (Le città invisibili, 1972) par l’auteur lui-même. Ces voix accompagnent des images animées réalisées par Thomas Bataille dans des métropoles chinoises et des images fixes réalisées par Jacques Lévy lui-même lors de ses nombreux voyages à travers la planète : Manille, Dhaka, Buenos-Aires, Johannesburg, Mostar, Detroit, Rio, Dubaï, La Paz, Chandigarh… Le tout est accompagné de musiques (plutôt stressantes) d’Alban Berg, de Györgi Ligeti, de Wolfang Rihm et d’Anton Webern.
L’ensemble donne un objet cinématographique intriguant mais attachant. Le rythme lent se prête particulièrement bien à la communication de la pensée de Jacques Lévy. L’animation combinée de la population du monde et des villes sur le temps long est particulière réussie et pourrait être utilisée avec des élèves de seconde dans le cadre du chapitre sur les villes (Chapitre 3 : Une utopie première). Au-delà de cet extrait, directement utilisable en classe, les enseignants auront beaucoup à gagner à visionner (et revoir) l’ensemble de l’œuvre pour réfléchir à la nature de la ville, à la force des liens faibles (chapitre 4) qui la caractérisent, au décalage entre ce qu’on y fait et ce qu’on pourrait y faire, à la place des espaces publics et de la sérendipité (l’avènement de trouvailles inattendues) dans les processus sociaux qui se jouent dans cet espace de co-présence. Car, comme le disait si bien Georges Pérec : « Il n’y a rien d’inhumain dans une ville, sinon notre propre humanité. »
Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes