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Atlas de la mondialisation. Comprendre l’espace mondial contemporain.

Marie Françoise DURAND, Benoît MARTIN, Delphine PLACIDI, Marie TORNQUIST-CHESNIER

Compte-rendu par Gérard BUONO ,
Lycée Soult de Mazamet et Centre Universitaire Champollion d’Albi

Atlas de la mondialisation. Comprendre l’espace mondial contemporain.

Nouvelle édition de mars 2007. Proposant « 16 nouvelles doubles pages, et plus de cent cartes et graphiques inédits ». 160 pages. Presses de SCIENCES PO.

La quatrième de couverture l’affirme, et elle est en droit de le faire : cet ouvrage n’est pas un simple outil, c’est une véritable boîte à outils. Il offre certes un riche éventail d’outils cartographiques, mais propose aussi notices et modes d’emploi, pour aller bien au-delà du simple bricolage…Le titre (« Atlas… ») pourrait laisser croire que sont privilégiées localisations et descriptions des principaux lieux et des principales dynamiques territoriales associées à la mondialisation, nouvel « Imago mundi », version XXI°siècle. Or, c’est beaucoup plus que cela, puisqu’une partie rédactionnelle de qualité permet aussi de faire le point sur une bonne partie des concepts essentiels habituellement mobilisés sur ces questions.
Sur le plan formel et sur celui de la construction d’ensemble, la réussite est évidente. L’organisation générale est claire : une double page est accordée à chacun des thèmes retenus. Les apports respectifs de l’équipe (une géographe (MF Durand), un cartographe (B. Martin) et deux spécialistes de sciences politiques) s’y complètent : à part égale, un texte synthétique fait le point sur chaque question traitée, en mettant en exergue les mots-clés, et en proposant des renvois aux questions connexes, tandis que de multiples cartes et graphiques appuient la réflexion proposée.

Comme l’annonce la préface de Bertrand Badie, le projet est d’ « apprendre à penser le monde dans toute sa mobilité, son interdépendance et dans son intégration ». Il s’agit donc de décrire l’enchevêtrement de processus complexes de la mondialisation, d’en identifier les acteurs majeurs, de faire apparaître les identités et allégeances nouvelles, les fractures actives, en « conceptualisant sa fluidité, donc en se dégageant des seules figures classiques » (celles de l’Etat-nation, de la frontière, de l’ennemi, des identités exclusives,…).
Les auteurs tablent sur six entrées thématiques, « qui combinent les disciplines, l’espace et le temps ». Elles sont bien identifiées, non seulement dans la table des matières, mais encore dans la mise en page. Chacune de ces six parties est composée de six à neuf doubles-pages, elle est clairement repérable (une couleur différente sur la tranche pour chaque chapitre) :

– orange : « Des espaces contrastés » (à l’opposé de l’homogénéisation, l’accentuation des fractures d’un monde global)

– bleu : « La régionalisation du monde » (les différentes formes d’intégration régionale : vers des pôles régionaux, supranationaux ?)

– vert : « Acteurs transnationaux » (la puissance et complexité des réseaux : firmes, ONG, médias, Maffias, etc.)

– rose : « Quêtes d’allégeances » (les recompositions identitaires qui accompagnent la perte des repères collectifs : émergence des identités religieuses, nationalismes sans frontières, communautarismes, etc.)

– vert : « Paix et guerres » (nouveaux rapports de forces et nouvelles formes de conflits de l’ère globale : Etats manqués, Etats contre réseaux, etc.)

– violet : « Vers de nouvelles régulations » (les questions de la gouvernance mondiale)

L’introduction de l’Atlas de la mondialisation est déjà beaucoup plus riche qu’un simple préambule. Après quatre pages consistantes de mise au point sur « Les espaces-temps du monde », qui mettent en perspective la question de la mondialisation et justifient le plan de l’ouvrage, elle récapitule en six pages supplémentaires les principes graphiques essentiels de ce type de production, et explique par anticipation les choix arrêtés, pour les cartes comme pour les graphiques (projection, discrétisation, figurés,…) ainsi que la nécessaire réflexion sur les données statistiques, leur source et leur usage.

La dernière partie confirme la qualité d’ensemble et la richesse de l’outil : en plus de quelques fonds de cartes (planisphères, continents), un lexique indexé de qualité est proposé. Il joint à chaque définition des renvois aux pages les plus utiles sur le sujet, et aux autres entrées du lexique traitant d’un sujet proche (il y a près de 20 pages d’index, et en moyenne une petite dizaine d’entrées par page : de la simple définition commentée -par exemple IDH ou PIB-, jusqu’ à des développements plus complexes, comme, par exemple, après une définition générale de la notion d’Etat, celles des acceptions multiples et variées apparues plus ou moins récemment (Etat providence, Etat manqué, Etat virtuel, Etat voyou, Etat malin..)

Quelques photographies (bien réduites en surface, malheureusement, comme certaines des cartes) illustrent la couverture, ou les pages d’entrée de chacun des six chapitres. Les auteurs ont pris soin d’en donner un commentaire, à l’intérêt certain (« Lire les photos », de la page 137 à la page 147).
Une liste des sigles et de leur signification (en deux pages) précède une bonne bibliographie. L’extrême abondance de la production sur ces questions de la mondialisation/globalisation rendait l’exercice périlleux. Son utilité est certainement améliorée par le choix de classer les références retenues, thématiquement, en suivant le plan adopté par l’ouvrage lui-même (les six entrées, et leurs composantes thématiques).
Les futurs candidats à l’agrégation interne ont certainement là un ouvrage de chevet tout trouvé (Cf. nouvelle question au programme), mais la qualité des contenus et le caractère pratique et accessible de « l’Atlas de la mondialisation » en font certainement un achat aussi utile pour les enseignants (quelque soit le niveau d’exercice) que pour les élèves (de terminale en particulier).

© Clionautes – Gérard Buono

Atlas de la mondialisation, comprendre l’espace mondial contemporain

Durand MF., Martin B., Placidi D., Tornquist-Chesnier M.

Presses de Sciences Po, Mars 2006, 126 p.

Phénomène ancien comme le rappellent Bertrand Badie dans la préface ou les auteurs dans l’introduction, la Mondialisation est l’objet de toutes les attentions, au centre de nombreux discours mais sa réalité, multiforme, n’est souvent pas prise en compte dans sa globalité. L’Atlas de la Mondialisation s’attache ainsi à donner des clés pour mieux appréhender ce phénomène en insistant sur l’importance du duo déterritorialisation/ territorialisation que l’on retrouve tout au long des six chapitres qui composent l’ouvrage.

Le premier chapitre, Des espaces contrastés, aborde parfaitement les problématiques des mobilités, du vieillissement même si certains commentaires peuvent prêter à débat. Ainsi, p. 19, les auteurs affirment : « Les effets cumulés de la traite, de l’absence d’Etats, et des systèmes coloniaux contribuent à expliquer la très faible densité. ». Cette généralisation aurait mérité une inflexion que le format choisi ne permet peut être pas d’aborder. Les principaux indices sont commentés et parfaitement analysés. Ainsi, le graphisme lié à l’indice de Gini, mettant en relief les inégalités internes, permet une approche plus fine que la traditionnelle ligne de partage Nord-Sud.

La régionalisation du Monde, titre du second chapitre, est une partie stimulante qui débute autour d’une problématique pertinente : « Après des siècles d’universalisation de la forme étatique, assiste-t-on aujourd’hui à la généralisation du modèle régional ? ». Les auteurs partent de l’hypothèse d’un « néorégionalisme », d’une régionalisation ouverte. L’approche multiscalaire est tout à fait adapté à la démonstration et permet d’avoir une analyse géographique de tout premier ordre du phénomène. L’ensemble des continents est observé sous le prisme des organisations régionales qui tentent de réguler la mondialisation.

La troisième partie, Des acteurs transnationaux, insiste sur les acteurs globaux, essentiellement les Firmes Multinationales et les ONG. L’hypothèse retenue, la McDonalisation du monde permet de comprendre les stratégies territoriales de ces acteurs qui jouent un rôle central dans le phénomène mondialiste et qui font l’objet, dans le dernier chapitre, d’un rappel. De plus, l’analyse de la fracture numérique permet une approche stimulante de la déterritorialisation que seules les très grandes villes peuvent juguler et territorialiser. Enfin, l’étude des flux illicites, avec une mise au point sur les paradis fiscaux et les réseaux terroristes, permet d’introduire la suite de l’ouvrage.

Quêtes d’allégeances est un chapitre qui envisage ensuite la question de la diversité. En effet, la première sous partie aborde les causes historiques de la mondialisation avec deux cartes tout à fait pertinentes et stimulantes. La typologie choisie des Etats (Etats effondrés, ; Léviathans boiteux, Etats faibles, Etats virtuels…) permet de mieux saisir les causes des problèmes contemporains même si des exemples détaillés auraient été un véritable plus pour mieux appréhender cette division du monde entre les démocraties installées depuis longtemps et les pays dont l’indépendance est récente. Deux des principales religions mondiales sont analysées, le christianisme et l’islam qui viennent en contrepoint d’une critique de la thèse de Samuel Huntington. Très intéressante, et schématisant à la perfection les dérives de la médiatisation à l’heure de la mondialisation, est l’analyse des auteurs sur le terrorisme en liaison avec l’Islam : « Les actions des minorités violentes, et plus particulièrement le terrorisme, sont surmédiatisés et alimentent des visions culturalistes qui essentialisent l’Islam, le réduisant à sa fraction radicale. ».

L’avant dernier chapitre, Paix et Guerres, envisage la mondialisation comme l’essence même de la fin des guerres traditionnelles. Les finalités des guerres se sont modifiées, illustrées parfaitement par la carte ‘Génocides et politicides’, p.69. Les enjeux globaux contemporains sont abordés avec la crise de la prolifération nucléaire et les tensions énergétiques, même si on peut regretter la part minorée réservée à la Chine.

Enfin, la dernière partie, De nouvelles régulations ?; met en avant le rôle de l’ONU dans le règlement des conflits, de l’OMC pour réguler le commerce (avec une mise au point des derniers rounds) et des problèmes environnementaux dont le protocole de Kyoto révèle les enjeux. Enfin, le rôle des ONG dans la création de la Cour Pénale Internationale est parfaitement analysé et permet une mise au point intéressante sur une régulation citoyenne mondiale.

La qualité des cartes de Sciences Po, reconnue depuis longtemps par l’Atelier de Cartographie (http://www.sciences-po.fr/cartographie/) animé par Marie-Françoise Durand, est remarquable.
De plus, un des intérêts de l’ouvrage est de donner un guide en vue de la réalisation et de la lecture des cartes (p.12 à 15) que de nombreux étudiants en géographie se doivent de connaître.
Les données, difficiles à réunir aux vues de la complexité et la variété voire de la crédibilité de certaines sources, sont parfaitement mises en valeur avec des graphiques clairs et commentés.
Des mots-clés pertinents et nombreux dans chaque sous-parties, renvoient à un lexique indexé à la fin de l’ouvrage.
Une bibliographie détaillée pour chacune des parties de l’Atlas de la mondialisation est l’occasion d’avoir des pistes sérieuses pour compléter des connaissances que ces quelques pages ne peuvent approfondir. Il est tout de même étonnant que l’ouvrage de Laurent Carroué sur la Mondialisation, ou celui d’Olivier Roy sur l’islamisme ne soient pas mentionnés dans ladite bibliographie. On pourra aussi compléter avec un exposé (http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=908 ) de Christian Grataloup en guise d’hommage à Olivier Dollfus.
Enfin, le commentaire des photos de l’Atlas (p. 107-117) est un plus incontestable et illustre la variété et le sérieux de l’ouvrage.

L’Atlas de la Mondialisation est un ouvrage de première qualité pour les enseignants voulant renouveler ou approfondir leurs connaissances mais aussi pour les étudiants dans le supérieur ou les lycéens avisés même si ce n’est qu’une porte d’accès à un concept qui renferme bien d’autres complexités. Les candidats au CAPES et à l’Agrégation auront tout intérêt à commencer cette nouvelle question par cette mise au point tout à fait éclairante des enjeux contemporains.

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